1 - Le Kick'em Jenny : présentation
Le
 Kick'em Jenny (KEJ) est un volcan sous-marin situé à 8 km au Nord de 
Grenade, à 300 km au Sud de la Martinique. Son sommet est situé à 180 
mètres sous la surface de la mer. Il s'agit du seul volcan sous-marin 
vraiment actif des Antilles.
2 - Pourquoi semble-t-il plus dangereux aujourd'hui ?
C'est un volcan très surveillé.
Jeudi
 matin, entre 1h25 et 3h00, heure locale, son activité s'est amplifiée, 
c'est-à-dire que les secousses sismiques se sont multipliées et un 
dégazage a été constaté.
Le
 Centre de Recherche Sismique de l'Université West Indies a alors placé 
le volcan au niveau de vigilance orange. Le périmètre maritime 
d'exclusion est aussi passé de 1,5 à 5 km de rayon autour du volcan.
3 - Quels sont les précédents événements ?
En
 1939, une éruption importante du KEJ eut lieu, envoyant un nuage de 
cendres à 270 mètres au-dessus du niveau de la mer. Le tsunami qui 
suivit présentait une amplitude de 2 mètres sur les côtes de Grenade. Au
 niveau de la Martinique, les vagues arrivèrent, selon les sources, avec
 une hauteur de 30 à 70 cm. Depuis, onze autres éruptions ont eu lieu, 
ne donnant pas lieu à un tsunami visible.
4 - Quelle est la hauteur de vague possible ?
Cela
 dépend du phénomène qui cause le tsunami. Selon la thèse de Frédéric 
Dondin, menée au sein de l'UAG, un effondrement d'un pan du volcan 
pourrait entraîner une vague, chez nous, d'une hauteur de 5 à 20 cm.
Pascal
 Saffache, président honoraire de l'UAG, en se basant sur le cas d'un 
tsunami créé directement par l'éruption, comme en 1939, évoque une 
hauteur d'environ 50 cm. Même si cette hauteur s'enfoncerait 
relativement bien dans les terres, il n'y aurait pas de grand danger 
pour la population. Cela causerait plutôt des dégâts matériels. Le 
tsunami mettrait entre 30 et 40 minutes à nous parvenir.
Une image du Kick'em Jenny reconstituée par sonar. (NOAA)
5 - En conclusion : peut-on aller à la plage ?
Même
 en éruption, le Kick'em Jenny ne provoquera pas forcément un tsunami. 
Et si tsunami il y a, c'est surtout à Grenade que les dégâts peuvent 
être importants! Il n'est donc pas utile d'annuler sa sortie plage ou 
yoles ce week-end! D'ailleurs aucune mesure n'est prise, et il n'y a pas
 d'alerte tsunami.
Toutefois,
 il faut souligner que la population, à l'heure actuelle, n'a que peu de
 moyens d'être informée de l'arrivée d'un tsunami : porte-voix communaux
 ou médias (voir plus bas).
«
 Il faut donc rester vigilants ces prochaines semaines, observer par 
exemple si la mer semble se retirer » , souligne Pascal Saffache. 
Concernant le risque tsunami de manière général, un réflexe devrait être
 adopter par l'ensemble de la population : celui de monter dans les 
hauteurs après un fort tremblement de terre et notamment quitter les 
plages.
Le Kick'em Jenny est situé à 8 km au nord de l'île de Grenade
Vigilance orange : quelle signification ?
La
 confusion peut être grande. En général, quand on parle de vigilance 
orange, c'est relatif aux risques Fortes pluies ou Cyclones! Cette 
échelle-là n'a rien à voir. Il s'agit d'une échelle du niveau d'activité
 volcanique à quatre niveaux : vert, jaune, orange, rouge. Le niveau 
orange signifie que les fumerolles et séismes se multiplient. Le niveau 
rouge est atteint quand le volcan est en cours d'éruption, ce qui 
n'entraîne, rappelons-le, pas forcément un tsunami.
 
L'échec de la communication grand public
Noyée
 sous les informations et contre-informations, la population ne sait 
plus à quel saint se vouer. Et propage aussi ses propres rumeurs et 
idées reçues...
Mais
 comment est-il possible qu'un simple bulletin d'information à caractère
 scientifique devienne en quelques heures une sorte de diable 
incontrôlable ?
« Martinique : vigilance 
orange au risque tsunami! » ; « Risque de tsunami dans la Caraïbe!! » , 
peut-on lire depuis jeudi soir sur les réseaux sociaux, et parfois 
jusque dans la presse nationale...
Si un 
tel déferlement d'informations et de contre-informations est possible, 
c'est bien parce que la communication des autorités, envers la 
population, est encore défaillante sur ces sujets. Elles y travaillent 
sérieusement mais le chantier n'en est qu'à ses balbutiements. Les 
rumeurs et idées reçues vont beaucoup plus vite!
Que
 s'est-il passé exactement ? Jeudi, l'Observatoire volcanologique et 
sismologique de Martinique relaie le bulletin d'information du Centre de
 Recherche Sismique de l'Université West Indies. On y parle sismicité, 
on y parle vigilance orange. Le bulletin est technique et, bien entendu,
 ne donne pas la conduite à suivre.
La 
préfecture, de son côté, relaie l'information sur son Facebook. « Nous 
avons agi à la hauteur de l'importance de l'événement » , explique un 
proche du dossier. « Il n'y avait pas d'alerte au tsunami. » La toile, 
elle, s'est emparée toute seule du sujet, d'autant qu'une information 
semblant provenir des « Américains » trouve toujours une oreille du 
public beaucoup plus attentive que lorsque ce sont les autorités 
françaises qui s'expriment...
Météo-France
 connaît bien le sujet. À chaque saison cyclonique, l'organisme affûte 
sa communication. « Il est toujours très difficile de communiquer sur un
 sujet plein d'incertitudes, où les connaissances ne sont forcément pas 
complètes » , explique Jean-Noël Degrace, le directeur régional.
Le
 risque Tsunami en particulier a été pris en compte de manière récente. 
Les autorités (le service interministériel de défense et de protection 
civile, sous l'autorité du préfet en particulier) multiplient les 
réunions. Ce que l'on nomme l'alerte montante (c'est-à-dire la 
communication du phénomène depuis les scientifiques jusqu'aux autorités,
 dont les communes et l'Etat) est en nette amélioration. Par contre, 
pour l'alerte descendante (c'est-à-dire l'information transmise à la 
population), c'est encore une catastrophe : il n'y a pas de système 
d'alerte sur les plages, les réflexes sont non acquis par la population.
Là
 aussi, le chantier est en route. Le « Groupe intergouvernemental de 
coordination du Système d'alerte aux tsunamis et autres risques côtiers 
dans la mer des Caraïbes et les régions adjacentes » (GIC/CARIBEEWS), 
qui existe depuis 2004, prépare notamment un système de labellisation 
pour les communes, associations, entreprises, qui se montreront capables
 de gérer le risque tsunami en amont et en aval.
 
 
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